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Narcisse Tehoué (Commissaire général de la 6ème édition du festival culturel Badjouhonan) : « Venez découvrir le Peuple Wê dans toute sa diversité sociologique, culturelle »

Le Commissaire général de Badjouhonan
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A l’instar du Pôpô Carnaval de Bonoua, de l’Abissa de Grand Bassam et le Pâquinou des Baoulé, le festival culturel Badjouhonan se définit comme un moment de retrouvailles et de  promotion des Peuples Wê. En tout cas, c’est le rêve que caresse l’Association Awéakin qui  ambitionne, par ailleurs, de laisser Badjouhonan comme héritage aux Peuples Wê. Nous dit Narcisse Tehoué, commissaire général du festival culturel Badjouhonan dont la 6ème édition est prévue du 22 au 31 décembre 2023. Entretien …

Le vocable BADJOUHONAN a-t-il une signification particulière ?

 Un mot issu du Wê et qui signifie l’endroit où on se lie d’amitié, où l’on se rencontre et où l’on se (re)découvre. Et cette découverte est sous deux angles. D’abord nous les Wê, on se découvre et les autres peuples viennent également découvrir le Wê dans toute sa diversité (sociologique, culturelle etc.)

Quels sont vos ambitions en initiant ce festival?

L’Association Awéakin ambitionne de laisser Badjouhonan comme héritage aux Peuples Wê. C’est en cela que nous en faisons un projet intégré. Car en dehors du festif, il y a la promotion de la culture Wê avec ses dérivés. Notamment l’aspect social, économique.

Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ces aspects socioéconomiques ?

 En effet, nous avons entrepris beaucoup d’activités. Notamment un arbre de Noël, des dons aux femmes et le reprofilage des voies de certaines localités.

Sur le plan économique, il y a l’implémentation de deux projets pour lesquels nous sommes en ce moment en quête de financements et récemment nous avons permis à des femmes de bénéficier d’un prêt sans intérêt de 10 millions FCFA.

Avec la CAN, Badjouhonan va-t-il jouer sa partition en incorporant l’aspect sportif ?

 Le Ministère du Tourisme en collaboration avec la faîtière des acteurs de loisir a prévu une animation pour la période de la CAN. Donc oui. Nous allons jouer notre partition et les choses se précisent au niveau de la faîtière.

Il faut dire que l’aspect sportif est déjà inclus dans le festival avec les jeux et sports patrimoniaux que nous organisons, sauf qu’ils sont incorporés au culturel.

Quel est donc cet héritage que vous voulez laisser à la postérité ?

 Le constat que nous avons fait en son temps est qu’à partir de 2002, le Peuple Wê s’est disséminé partout. Ce qui a eu des conséquences sur notre culture. Parce que lors des troubles sociopolitiques, l’Ouest du pays a payé un lourd tribut avec entre autres la perte de la majorité des personnes du 3ème âge, dépositaires pour la plupart de notre culture. Or, selon la mémoire collective, en Afrique, un vieillard qui meurt c’est une bibliothèque qui brûle.

Dès cet instant, il était impératif de faire quelque chose pour permettre à la population Wê de se réapproprier sa culture afin de la pérenniser. Or, nous savons qu’il n’y a de culture que s’il y a des hommes pour la faire vivre. Donc il nous incombe à nous les Wê de faire revivre notre culture en la revalorisant. Surtout que la Culture Wê est l’une des cultures mère de toutes les cultures. Donc pourquoi laisser mourir la culture mère?

BADJOUHONAN et le Tonkpi Nihidalé se déroule dans le même District des Montagnes. Qu’est-ce qui vous différencie ?

 Le Festival Culturel Wê Badjouhonan se déroule dans le Guémon tandis que le Tonkpi Nihidalé se déroule dans le Tonkpi. Bien que nous partagions une partie de la culture à cause du voisinage, il y a une différence majeure au niveau de la date et du contenu.

Est-ce que cela ne va pas poser un problème de concurrence au niveau des deux festivals ?

 Non. Il n’y a ni concurrence, ni chevauchement. Parce que la Culture Wê est différente de la Culture Dan. De plus, les dates sont établies de sorte que les localités soient animées. A tel enseigne que les festivaliers après le Tonkpi Nihidalé se rendent à Badjouhonan la semaine suivante.

 Aujourd’hui, à la 6ème édition quel est le bilan que vous faites ?

 Au- delà de la satisfaction personnelle, il y a la satisfaction générale. Nous constatons qu’il y a un renouveau. Notamment avec la multiplication des festivals dans la Région, les cadres construisent leurs résidences. Les retours sont également encourageants parce que les commerçants font de bonnes affaires.

Cependant, nous avons beaucoup de difficultés. Entre autres, le manque d’appui et d’accompagnement de la tutelle, le manque de partenaire. Également les autorités de la Région peinent à s’impliquer véritablement. Or si elles s’y mettent, BADJOUHONAN serait propulsé depuis.

Mais nous pensons en même temps qu’il est de notre devoir de prouver à la population que notre cause est noble, apolitique. Chose que nous nous attelons à faire depuis 6 ans.

D’ailleurs le comité d’organisation de Badjouhonan est ouvert à toute personne qui pense pouvoir apporter son expertise.

Étant donné que vous n’avez ni aide ni soutien comment faites-vous depuis toutes ces années pour l’organisation ?

C’est la grâce de Dieu. Nous ne sommes pas totalement orphelins. Même si nous ne bénéficions pas d’accompagnement ministériel, il faut dire qu’au fil des années, nous avons eu le soutien financier de quelques cadres de la Région et l’implication de toutes les composantes de la couche socio-professionnelle de Tiény-Séably (la mutuelle, la jeunesse, les femmes et les hommes) au niveau de l’organisation en termes de mobilisation. Hormis cela, l’Association Awéakin organise le festival par la volonté des organisateurs et de bénévoles.

Pourquoi à Tiény-Séably, une localité modeste et non la capitale régionale ?

Le choix n’est pas hasardeux. Tiény-Séably est une localité centrale majeure dans la Région. Son choix répond à plusieurs options. Au plan historique, c’était le centre économique. Au plan Politique, c’était une localité où les colons se sont installés et c’est le chef-lieu de Sous-préfecture et du Canton Péomé. Au plan géographique, le village est situé à équidistance de Man, Facobly et Kouibly. De plus, il est facilement accessible.

Est-ce que la taille de la localité ne pose pas un problème de logement et de sécurité ?

Pas du tout. Vu que toutes les dispositions sont prises pour la sécurité des biens et des personnes grâce à la présence des éléments de la Légion de Gendarmerie de Man et ceux de la Brigade mobile de Facobly. Le festival a en son sein également des jeunes bénévoles qui ont été formés à la sécurité.En ce qui concerne les logements, les cadres et les ressortissants de Tiény-Séably se proposent spontanément d’héberger les festivaliers. Pour ceux qui le désirent, ils peuvent loger en dehors des hôtels de Tiény-Séably. Le festivalier a la possibilité de loger dans les départements suscités qui abritent des réceptifs hôteliers à 30 mn (Kouibly), 8mn (Facobly) et 9mn (Man).

Comment la célébration de la Noël et les activités sanitaires ont-elles été accueillies l’année dernière?

Ce n’est pas la première fois que l’Association Awéakin le fait. A la différence que cette fois-ci nous l’avons incorporé au festival. Ces innovations majeures ont été bien accueillies et nous comptons reconduire ces activités.

L’année dernière vous avez invité le Peuple Gouro et cette année le Peuple Mahou. Quels sont vos critères de sélection ?

Le roi ne peut pas être heureux sans son esclave (rire). Donc pour nous, c’était tout à fait normal qu’ils soient à l’honneur. Également cette année nous avons opté pour le Peuple Mahou avec qui nous avons un lien séculaire et qui a une richesse culturelle inouïe.

Vous avez mentionné le nom d’une association pouvez-vous nous en dire plus?

L’Association Awéakin est l’initiatrice du festival Badjouhonan. Elle est née par la volonté d’hommes et femmes issus de la Côte d’Ivoire et appartenant à toutes les couches socio-professionnelles. Elle œuvre pour le bien-être de la population de la région à travers le tracé et le reprofilage des voies, l’assistance et dons aux personnes vulnérables.

Pourquoi la période du 22 au 31 décembre pour le festival ?

Au plan culturel, Badjouhonan entend devenir, à l’instar de la Pakinou des Baoulé, le Pôpô carnaval de Bonoua. Un moment de retrouvailles des Wê. Or à cette date, les parents-paysans ont finis la récolte du riz, vendu le cacao et se reposent. Et à cette date qui est la période de l’harmatan, il n’y a pas de risque de pluie.

Quelles sont les innovations de cette année ?

Cette année, il y aura plusieurs nouvelles activités. Notamment la compétition de pétanque, l’art culinaire Wê avec les matriarches coachs pour la transmission des valeurs culturelles, les soirées traditionnelles des femmes.

Avez-vous un appel particulier ?

C’est un cri du cœur que je lance. Nous tenons à vous mettre en mission de manière fraternelle afin que les institutions étatiques nous accompagnent. Les entreprises commerciales et les institutions nous accompagnent. Parce que Badjouhonan est une lucarne qui va leur donner également de la visibilité. Car nous sommes aujourd’hui un festival majeur dans la Région et au-delà. En témoigne les touristes français et espagnol que nous avons reçus l’année dernière.

Réalisée par Nando Dapa, collaboration Angeline DJÉRABÉ pour UPLCI

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