C’est parti pour la 5e édition des Journées de la Fonction Publique (JFP) devenues une tradition depuis 2021. Le coup d’envoi de cette édition a été donné ce mercredi 25 juin 2025 au Palais de la Culture d’Abidjan Treichville par la conférence inaugurale dont le thème est « Bilan et perspectives des actions du service public » animé par Ahoutou Koffi Emmanuel, directeur de cabinet du vice-président de Côte d’Ivoire, Tiémoko Meyliet Koné. Plusieurs membres du gouvernement ivoiriens, des responsables de l’administration ivoirienne et des partenaires ainsi que des fonctionnaires et agents de l’Etat étaient présents.
Ahoutou Koffi Emmanuel, pur produit de l’Administration ivoirienne a partagé son expérience d’une quarantaine d’année dans cette administration qui depuis 2011 connaît un changement positif sous l’impulsion du président Alassane Ouattara et sous la direction de la ministre d’Etat, ministre de la Fonction publique et de la modernisation de l’administration, Anne Désirée Ouloto. Selon le conférencier le thème de cette conférence inaugurale est une interpellation à rêver grand pour un service public efficace et de qualité.
Faisant le bilan de la vision du chef de l’Etat ivoirien de l’administration publique de 2011 à 2025, le ministre directeur de cabinet de Tiémoko Meyliet Koné a indiqué que sous l’impulsion du président Alassane Ouattara, la Côte d’Ivoire a engagé une profonde transformation de l’Etat fondée sur une gouvernance modernisée et renforcée.
« Cette dynamique a conduit d’importantes réformes notamment celles issues de la Constitution de 2016, la restructuration du système judiciaire ainsi que l’opéralisation des nouvelles institutions telles que la Cours des comptes, la Haute autorité de la bonne gouvernance, etc. », a dit le conférencier.
Pour Ahoutou Koffi Emmanuel, le président Alassane Ouattara a accordé une attention toute particulière à l’Administration publique considérée comme un levier essentiel à la disposition de l’exécutif pour répondre efficacement aux besoins des populations. Il a expliqué que la vision du président ivoirien s’est traduite à travers la proposition des Plan nationaux de développement (PND) successifs depuis 2011.
Il a, par ailleurs fait savoir que le PND 2012-2015, avait déjà posé les bases de la transformation de l’administration publique ivoirienne avec des actes spécifiques sur la modernisation de l’administration, le renforcement de l’efficacité, la promotion de la transparence, la lutte contre la corruption et l’accroissement de la participation citoyenne.
Il précisera que le PND 2016-2020 a permis de consolider cette orientation avec des actions bien structurées visant la dématérialisation des procédures, les contrats de performances, les codes de déontologie et la promotion de la gouvernance électronique. Enfin le directeur de cabinet ayan rang de ministre a relevé que le plan PND en cours 2021-2025, s’est approfondi dans une dimension culturelle avec la promotion de l’Ivoirien nouveau symbole d’un agent public intègre, moderne et au service du bien commun.
« On peut relever également le développement du capital humain avec une priorité donnée à la formation des agents publics, la lutte contre la corruption et l’amélioration de la gouvernance ainsi que le renforcement de la modernisation de l’administration pour la rendre plus accessible, plus équitable et plus inclusive pour les populations. Cette vision donnée par le président Ouattara devrait faire d’elle, une administration de développement, accessible, à la disposition de l’Ivoirien nouveau, qu’il soit le citoyen lamda, comme les investisseurs étrangers, en vue de créer de la valeur et offrir des opportunités à d’autres Ivoiriens », a-t-il affirmé.
Parlant du bilan issu de la vision donnée par le président Ouattara à travers des actions entreprises, le conférencier a précisé que « cette vision stratégique définie par le président de la République depuis près de deux décennies a donné lieu à une réforme en profondeur de notre Administration. Cela s’est matérialisé par des réformes institutionnelles et par des efforts soutenus de modernisation des pratiques et des outils. Ces efforts ont produit des résultats tangibles qui traduisent une nouvelle dynamique de gouvernance. »
Selon lui, au plan institutionnel les réformes ont permis de bâtir les fondations d’une administration stratégiques, éthique et ouverte. « Cette gouvernance s’est incarnée dans l’évolution même de la dénomination du Ministère en charge de l’administration qui a été élevé au rang de Ministère d’Etat, ministère de la Fonction publique et de la modernisation de l’administration, affirmant clairement l’importance de la modernisation administrative dans le projet de société de l’Etat de Côte d’Ivoire », a-t-il déclaré. Pour Ahoutou Koffi, dans le principe de modernisation, plusieurs avancées structurantes ont été enregistrées.
Il citera la création du Secrétariat national de renforcement des capacités, chargé de coordonner les politiques nationales en matière de renforcement des compétences en lien avec les priorités de transformation, la réorganisation de la gouvernance territoriale avec la création des districts autonomes et la désignation des ministres gouverneurs à leur tête afin d’assurer le relais de la coordination des actions gouvernementales.
Parlant du bilan au niveau de l’ordre de service du secteur public il a relevé la restructuration du CEPICI pour fluidifier les procédures administratives liées à l’investissement et à la création d’entreprises, avec la mise en place d’un guichet unique.
« Il faut mentionner la réforme des marchés publics… Il y a la création de la cellule d’information pour les opérateurs économiques pour mieux informer et mieux servir les opérateurs économiques. Enfin le renforcement de la lutte contre la corruption avec les actions coercitives de l’Autorité de la bonne gouvernance et la création du centre de l’académie de la bonne gouvernance et du leadership anti-corruption qui est une création d’élite que notre pays à la chance d’avoir sous la haute autorité du président de la République, institution basée à Yamoussoukro avec une vocation régionale », a soutenu le conférencier. Il a, par ailleurs, souligné que la Côte d’Ivoire a progressé de 18 place dans l’indice de perception de la corruption entre 2023 et 2024 et de 67 place par rapport à son classement en 2013 en le positionnant à la 69e place mondiale.
Selon le conférencier, la Côte d’Ivoire n’a pas limité ses réformes qu’au plan national. « La Côte d’Ivoire a adhéré à l’Open Government Partnership (OGP), en s’engageant résolument dans la transparence budgétaire, la participation citoyenne et l’accessibilité aux données. Cet engagement a permis la mise en œuvre d’initiatives telles que le budget citoyen, qui rend lisible et accessible l’information budgétaire aux populations. Ce devoir de transparence a également été renforcé par la création de la Commission d’Accès à l’Information d’Intérêt Public et aux Documents Publics (CAIDP) ».
Il s’est réjoui du fait que le pays a franchi avec succès les premières étapes du Mécanisme Africain d’Évaluation par les Pairs (MAEP), aboutissant à la validation officielle de l’évaluation de base, lors du 38ᵉ Sommet de l’Union Africaine, en février 2025.
Parlant des réformes au plan opérationnel qui visent à rapprocher l’administration du citoyen et améliorer la qualité du service public, le directeur de cabinet du vice-président ivoirien a expliqué que les réformes institutionnelles ont favorisé la mise en œuvre d’actions concrètes sur le terrain, dans le but d’offrir aux citoyens une administration plus proactive, plus transparente et plus proche.
Cela se perçoit selon lui dans le Programme national d’appui aux Réformes Institutionnelles et à la Modernisation de l’État (PRIME) ; le Programme Pays de Renforcement des Capacités (PPRC) ayant contribué à la formation de milliers d’agents publics. « Ces efforts ont été appuyés par des programmes de formation de haut niveau, en partenariat avec des institutions telles que HEC Paris, le FMI et la Banque Mondiale », a-t-il soutenu. Dans la même veine, le conférencier a relevé que le programme e-Gouv, initié en 2011, a lancé la gouvernance électronique comme pilier de transformation. Et ce programme a ouvert la voie au déploiement d’outils numériques tels que la plateforme e-Impôts, qui permet désormais aux contribuables d’effectuer leurs déclarations et paiements en ligne ; la dématérialisation des marchés publics, qui renforce la transparence des procédures ; le Portail du Citoyen « Miliê », qui offre un espace d’interaction directe entre l’administration et les usagers ; la plateforme e-démarches administratives, pour la délivrance numérique des actes, incluant progressivement la signature électronique et la plateforme SIGNALIS, mise en place par la HABG, permettant le signalement sécurisé et anonyme des actes de corruption.
« Je voudrais également mentionner le Système Intégré de Gestion des Fonctionnaires et Agents de l’État (SIGFAE), l’outil mis en place par le Ministère de la Fonction Publique, en liaison avec le Ministère chargé du Budget, qui permet désormais de garantir une gestion plus rigoureuse, transparente et efficiente des ressources humaines publiques », a-t-il insisté.
En somme selon le conférencier, les efforts engagé par le gouvernement ont permis une mutation profonde des pratiques administratives qui ont eu pour résultats la réduction du temps moyen de délivrance des documents administratifs ; la hausse significative du volume de documents administratifs émis de manière électronique, posant ainsi les bases de l’Administration zéro papier envisagée à l’horizon 2030. « Ce progrès peut également s’illustrer par l’augmentation du nombre de plaintes traitées via des plateformes numériques ou reçues de manière anonyme et sécurisée, signe d’une confiance renouvelée dans l’administration », a-t-il expliqué.
Après avoir mis en lumière ces défis, Ahoutou Koffi Emmanuel a indiqué que des défis et obstacles restent à surmonter. Il s’agit entre autres de changer les habitudes, exiger de nouvelles pratiques face aux réticences liées parfois à des incompréhensions, voire la peur et des rejets. « Certains agents, dans nos administrations, continuent de voir la réforme comme une menace, plutôt que comme une opportunité. D’autres craignent de perdre leur pouvoir, leur zone d’influence ou leur sécurité », a dénoncé le conférencier avant de faire un appel à l’endroit des fonctionnaires et agents de l’Etat.
« Chers fonctionnaires et agents de l’État, la transformation ne peut réussir sans vous. Vous êtes les premiers ambassadeurs du changement. C’est vous qui, au quotidien, rendez possible et effective la politique publique, dans les bureaux, les écoles, les centres de santé, les préfectures, les directions régionales. Je vous invite donc à ne pas vous enfermer dans les pratiques anciennes, et à embrasser pleinement la dynamique de transformation et d’amélioration continue avec responsabilité et fierté », a-t-il rassuré.
Pour le ministre Ahoutou Koffi, le 2ème défi est le déficit de compétences numériques et managériales. Pour lui donc, la modernisation ne peut réussir sans des agents bien formés aux outils informatiques modernes ; des cadres capables de piloter des projets complexes, dans le respect des délais, des objectifs et de la qualité ; une capacité d’évaluation des résultats, indispensable pour corriger et ajuster les actions et un engagement individuel et collectif pour la culture du résultat.
« C’est tout le sens des initiatives de renforcement des capacités portées par le Ministère d’État et par l’Ecole Nationale d’Administration, qu’il faut poursuivre et amplifier », dira-t-il.
Quant au 3ème défi mentionné par le conférencier, il est relatif à la coordination interinstitutionnelle. « A ce titre, le rapport 2024 sur l’état de la transformation du service public montre que les initiatives sont nombreuses, mais quelque peu dispersées. Il y a parfois des chevauchements, des doublons, un manque d’harmonisation des méthodes et des outils », a tenu à relever le conférencier qui a proposé une solution. « Sur ces questions, le Ministère d’Etat, Ministère de la Fonction publique doit renforcer la coordination, l’accompagnement méthodologique, et surtout la capitalisation des bonnes pratiques ainsi que l’accompagnement du changement » a-t-il clairement indiqué.
En somme, le le 4ème défi, selon le ministre-directeur cabinet est l’ancrage territorial encore inégal. « Il est indéniable que d’importants efforts ont été faits en termes de déconcentration et de décentralisation des services publics, avec l’appui des collectivités. Toutefois, il nous faut reconnaître que les bénéfices de la transformation du service public ne sont pas toujours équitablement répartis sur le territoire national », mentionnera-t-il.
Selon M. Ahoutou, dans plusieurs cas de figure, cela s’explique par le fait que l’ensemble de l’écosystème nécessaire à l’accélération de la transformation reste assez limité en région. Les services, a-t-il dit sont déconcentrés, les antennes régionales, les zones rurales restent ainsi parfois à l’écart des réformes en cours. Alors que pour lui, « moderniser, c’est rapprocher. C’est garantir à chaque citoyen, où qu’il vive, un service public de qualité comparable à celui offert à Abidjan, Bouaké ou Yamoussoukro. » Pour mettre fin à cette situation, il a demandé un renforcement de la déconcentration effective, mais aussi des moyens logistiques, humains et numériques adaptés aux réalités locales.
Parlant des perspectives pour une modernisation et une dynamisation continue de l’administration ivoirienne, le conférencier a appeler à mettre l’accent sur la transition numérique, avec l’émergence de l’intelligence artificielle, des données massives (big data), de la cybersécurité, qui redéfinissent les modes de gestion et de décision ; les impératifs environnementaux, qui imposent des pratiques plus durables, une réduction de l’empreinte écologique, et la promotion d’un service public écoresponsable ; la participation citoyenne, car l’usager n’est plus seulement bénéficiaire du service public ; il est aussi acteur, évaluateur et contributeur à son amélioration.
« La modernisation ne doit plus être perçue comme l’affaire d’un ministère ou d’un service. Elle doit devenir une culture partagée, mobilisant à la fois les administrations centrales et déconcentrées ; les collectivités territoriales ; les universités, les écoles, les centres de formation ; les partenaires techniques et financiers et surtout, les usagers eux-mêmes, par leur force d’interpellation et de proposition. Le service public sera ainsi plus agile, plus collaboratif et plus centré sur l’expérience usager », a conseillé le conférencier.
Il faut noter que la ministre d’Etat, ministre de la Fonction publique et de la modernisation de l’administration, Anne Désirée Ouloto a tenu a interpellé ses collaborateurs pour le travail qu’il reste à faire. Mais avant, elle a félicité chacun pour le travail qui a été fait au titre des avancées déjà enregistrées. Pour Anne Ouloto, désormais, il s’agit d’une administration ivoirienne où tous sont évalués du supérieur hiérarchique au plus petit agent afin de permettre à chacun de jouer efficacement son rôle pour une administration publique de qualité tournée vers un horizon plus moderne et modèle.
Avant l’intervention du conférencier, le directeur général de la Fonction publique, Soro Gninagofol, co-président de cette 5e édition des JFP a remercié les invités, les partenaires et autres pour leur présence effective. Il a indiqué que les JFP sont un espace d’information, de formation et de partage d’expérience. Cette 5e édition des JFP continue jusqu’au samedi 28 juin 2025 avec des panels, des jeux concours, des décorations de meilleurs fonctionnaires et agents de l’Etat…
Benoît Kadjo
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