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Promotion de l’excellence / Anderson Kouamé (Bénéficiaire du ‘‘Prix livre d’or 2024’’) : « …j’ai passé près d’un quart de siècle de ma vie dans la rue »

Anderson Kouamé, homme d’affaires.
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 Anderson Kouamé, homme d’affaires également patron de la fondation ‘‘Egalité en faveur des enfants de la rue’’, est l’un des récipiendaires du Prix livre d’or des acteurs du succès national qui a été organisé par le Réseau des communicateurs professionnels et de la société civile (RESCOMP-SCI), le vendredi 17 mai 2024. Interrogé par le groupe de presse GOVCOM (www.justeinfos.net et www.ledemocrateplus.com, il vante les mérites du travail bien fait. Aussi s’est-il voulu reconnaissant de ce prix du RESCOMP-SCI qui constitue le deuxième du genre après celui qui lui a été décerné en 2023 par l’Assemblée nationale française. 

Pouvez-vous nous décrire votre parcours ou si possible revenir sur cette émouvante histoire de votre vie que vous évoquiez à l’instant dans la salle ?

Oui, je reviens de loin. Et, je disais à l’instant que j’ai passé près d’un quart de siècle de ma vie dans la rue et c’est la vérité. C’est une période de ma vie que je n’oublie pas. car j’y ai traversé des temps difficiles, j’ai connu l’humiliation, des brimades et des malheurs. C’était mon quotidien. J’ai supporté autant de méchancetés de la part des hommes.

Des situations que j’ai réussi à surmonter grâce à Dieu. Je parle de 24 bonnes années bien comptées au cours desquelles j’étais livré à moi-même, au cours desquelles j’aurais pu tomber dans les tentations de la drogue, du tabac et de l’alcool auxquelles j’étais exposé. Mais Dieu m’a épargné. Et Dieu a déjoué tous ces dangers en ma faveur.

Comme armes de combat je n’avais que ma foi, mon humilité, ma persévérance, ma détermination. Des valeurs qui vont par la suite militer en ma faveur. A la vérité, j’espérais tout au fond de moi que la situation change un jour. Et Dieu a attendu ma prière et a envoyé sur mon chemin quelqu’un pour me tendre la main. Cela est arrivé alors que j’étais un laveur de véhicules dans un lavage auto où je me débrouillais.

Ce monsieur avait pris le temps de m’observer avant de se persuader que j’étais quelqu’un de bien. Cette personne m’a donc recueillie chez elle pour habiter avec sa famille. J’avais 18 ans en ce moment. Nous étions en 1990. Et, comme j’étais sans documents administratifs, il s’en est chargé. Il m’a ainsi donné l’opportunité d’avoir mes papiers. Il m’a également permis d’avoir mon permis de conduire. En contrepartie, j’étais devenu son coursier mais dans le bon sens du terme. Et en 1991 alors qu’il partait pour la France avec sa famille, il a voulu que je vienne avec eux.

C’était une façon pour lui de me donner ma chance afin que j’arrive à m’en sortir pour trouver ma place dans la vie. Je suis de ce fait resté en France de 1991, 1992 à 1993. Malheureusement là-bas aussi les choses n’ont pas été faciles. Et j’ai été rapatrié en Côte d’Ivoire en 1993 de surcroit menotté. Parce-que j’ai été pris en situation irrégulière. J’ai d’abord bien fait trois jours de prison avant mon rapatriement.

Je suis donc retourné en Côte d’Ivoire bredouille ni argent ni bagages. L’on m’a rapatrié tel que j’ai été pris. Ainsi de l’aéroport Félix Houphouët Boigny, je me suis retrouvé, à la gare nord Adjamé après des heures de marche. Je me sentais honteux. Je n’ai pas eu la force de retourner en famille. Il me fallait trouver à nouveau un nouvel horizon d’espoir.

J’ai donc décidé de rester dans la commune d’Adjamé. Sans diplômes avec seulement pour bagage intellectuel le niveau CE2. Je n’avais pas de perspective réelle de plan de carrière. Il fallait que je me batte comme je peux. J’ai finalement fini par être un gnambro. Je travaillais et dormais à la gare.  Je squattais même. Un gnambroman c’est ce jeune dans les gares routières qui propose ses services aux passagers ou voyageurs pour décharger ou porter les bagages moyennant un perdiem de 100 ou 200 FCFA en fonction du volume du service rendu.

J’ai mené cette activité pendant un moment. Avant de laisser tomber parce que je voyais que ce travail ne me permettrait pas de me prendre en charge comme il se doit. Avec ce job, j’avais réussi à économiser la somme de 67.000 FCFA. Et avec cet argent je me suis reconvertie en vendeur de friperies. Malgré tout, je ne m’en sortais toujours pas.  Mais je n’ai pas baissé les bras. Pendant ce temps Dieu m’a permis de faire la connaissance de quelqu’un, un vendeur de voitures, le frère d’un collègue vendeur d’habits brode.

Oui je suis aussi allé par là. Et je ne vends plus non plus de voitures. Parce que reconverti en un homme d’affaires depuis. J’ai investi dans plusieurs activités. Je bénis vraiment le nom de Dieu. Il faut dire que quelque part j’ai persévéré. J’ai su m’y prendre. C’est pourquoi, j’ai décidé à mon tour de regarder d’où je viens en tendant la main à ceux que j’ai laissé dans la rue. En réponse ou reconnaissance de ce que quelqu’un a fait pour moi un jour. Sinon je n’aurais certainement pas été à ce stade.

J’interpelle les uns et les autres pour dire que ces enfants qu’on appelle enfants de la rue, que j’appelle pour ma part enfants en situation de rue sont des enfants qui ont du potentiel. Qui ont quelque chose en eux et on juste besoin qu’on les écoute pour leur tendre la main afin qu’ils parviennent un jour à sortir la tête de l’eau et se réaliser.

Quelque part ce sont des enfants qui sont abandonnés, livrés à eux-mêmes, marginalisés. C’est pourquoi, j’ai décidé de faire de ce combat mon cheval de bataille pour donner à chacun sa chance.  C’est la mission que je me suis assignée. Elle se résume en trois mots : éducation, formation et insertion socio-professionnelle. Et comme dirait l’autre le savoir-faire ; il faut savoir le faire aux autres tout comme le savoir-vivre, le faire vivre aux autres. Je demande pour ce faire à tout le monde de jeter un droit de regard sur ces jeunes en situation de la rue ou dans la rue.

De la rue aujourd’hui à une cérémonie de distinction quel sentiment ?

Le sentiment, c’est le travail. Donc je dirais que cette distinction vient à juste titre. C’est d’ailleurs la deuxième distinction après celle décernée en 2023 par l’Assemblée nationale française. Je profite ainsi de l’occasion pour dire merci aux organisateurs de cette soirée. La persévérance certes, mais surtout je le redis c’est le travail qui paie.

Cela me fait aujourd’hui plus de 07 années que je suis dans la rue chaque trois heures du matin  aux cotés de ces enfants dans le district d’Abidjan pour les soutenir comme je peux en leur apportant de la nourriture ou des vêtements. Personne n’est obligé de le faire mais moi je me sens investi de cette mission.

Hélène Aka

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