Côte d’Ivoire-Burkina Faso : Ce que propose le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » pour mettre fin aux accusations de déstabilisation

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Déclaration du mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » après les graves accusations portées contre la Côte d’Ivoire par le Président du Burkina Faso

Les accusations du Président du Burkina Faso contre les autorités ivoiriennes

 Lors d’une rencontre avec les populations, le mercredi 11 juillet 2024, le Président du Burkina Faso, le capitaine Ibrahim Traoré, a porté de graves accusations contre la Côte d’Ivoire à qui il reproche d’abriter « un centre d’opérations pour déstabiliser » son pays et prétend disposer de « preuves physiques » pour les étayer. Ces accusations sont, d’ailleurs, récurrentes de sa part puisque, déjà, le 26 avril 2024, dans un entretien accordé à la télévision nationale burkinabè, il reprochait à la Côte d’Ivoire d’héberger des déstabilisateurs de son pays.

Ces accusations portent un coup au crédit international et sous régional de la Côte d’Ivoire malmenée, depuis quelques années, par les opinions publiques africaines.  Il faut rappeler que, depuis un peu plus de huit mois, des incidents frontaliers et des arrestations mutuelles de soldats ont détruit la bonne entente et érodé le capital de confiance entre ces deux pays frères et voisins.

La guerre économique derrière le terrorisme religieux qu’il faut comprendre

Ces crispations interviennent au moment où les pays de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) font déjà face au terrorisme djihadiste dont le coût économique est énorme pour eux, qui endeuille les populations, déstructure les sociétés villageoises et freine le développement de ces pays, avec un report dans le temps des politiques d’embauche et d’investissement ; ce qui les oblige à concentrer leurs efforts sur cette guerre lâche menée par les ennemis de l’Afrique et utilisée par eux comme méthode d’endiguement et de conditionnement du continent.

L’initiative terroriste djihadiste s’inscrit, en réalité, dans un contexte stratégique de guerre économique astucieusement masquée en conduites passionnelles relevant des tendances non rationnelles de l’humain. Elle sert à faire entrer dans les économies de la sous-région un amplificateur d’incertitudes pour freiner son essor économique dont les indicateurs, à partir de 2010, étaient très prometteurs sur le long terme ; l’émergence était à ses portes.

Selon la théorie économique, les pays en proie au terrorisme sont en phase d’incertitude radicale (Keynes). Ils font face à des défis sans précédent, avec de nombreux facteurs imprévisibles. Cette situation économique entraîne non seulement un recul de l’intervention publique en termes d’investissements et de programmes sociaux mais aussi et surtout une hausse des dépenses militaires et de sécurité.

Telle est la situation que traversent les pays frères de l’AES. Dans ces conditions, il ne peut pas y avoir de hausse de la consommation publique et privée pour relancer l’économie et, le solde budgétaire et les comptes publics restent négatif et en déficit. La politique monétaire devrait être ajustée en conséquence au contexte général pour des choix politico-économiques pragmatiques. Malheureusement, en la matière, les pays de l’AES n’ont pas de marge de manœuvre. Leurs interventions ne peuvent porter que sur les indicateurs macro et micro-économiques. Les pays de l’AES sont en grande difficulté due au terrorisme et n’ont pas besoin de tensions supplémentaires avec les voisins.

Il faut éviter toute escalade : l’histoire, la politique et la sociologie le recommandent.

Depuis l’époque des Présidents Félix Houphouët-Boigny et Maurice Yaméogo et même avant, il s’est installé entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso de solides relations d’amitié. Le brassage de populations entre ces deux pays est unique au monde et résulte des circonstances historiques et économiques mais aussi d’une politique d’intégration sous-régionale menée sans tambour ni trompette. Les couples mixtes ivoiro-burkinabè ne se comptent plus.

Au plan institutionnel, l’amitié entre les deux pays a été formalisée par les Présidents Laurent Gbagbo et Blaise Compaoré à travers la signature d’un Traité d’Amitié et de Coopération le 29 juillet 2008. Ce traité est un cadre d’échanges et de coopération qui, tous les deux ans, permet aux experts et gouvernements des deux pays de se retrouver et d’échanger sur des questions d’intérêt commun et d’entrevoir des initiatives communes pour le bonheur des deux peuples.

On ne peut pas avoir un tel instrument de coopération bilatérale et autant d’éléments historiques, sociologiques, culturels, etc. de proximité et laisser survenir des tensions comme ce qu’il est malheureusement donné lieu de constater depuis bientôt un an. C’est irrationnel et inadmissible. Le Traité d’Amitié et de Coopération aurait pu permettre d’éviter ces tensions dans les relations diplomatiques. Malheureusement, le problème vient des dirigeants politiques qui ne se font plus confiance et dont les agendas semblent ne pas répondre à l’impératif de paix.

La justesse du positionnement de « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » à qui les faits donnent toujours raison

Qu’il nous souvienne que, pendant que de nombreuses parties avaient adopté une posture belliqueuse, le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » faisait partie des voix qui appelaient au dialogue pour résoudre la crise diplomatique entre le Mali et la Côte d’Ivoire en 2023. Finalement, les événements ont donné raison à toutes ces voix qui appelaient au dialogue et à la négociation parce que c’était la voie de la sagesse et de la raison.

Aujourd’hui encore, pendant que les tensions entre le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire n’ont, pour le moment, pas atteint le seuil de la belligérance, le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » encourage les autorités ivoiriennes et burkinabè à un règlement pacifique de cette autre crise qui fait une très mauvaise publicité de la diplomatie ivoirienne. Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » a toujours eu pour lui la justesse de ses vues et la pertinence de ses approches sur les questions internationales et sous-régionales parce qu’il est un mouvement politique panafricaniste qui s’est attaché à la logique intellectuelle et délibérative des think-tank dans le seul intérêt de l’Afrique et non dans la défense d’intérêts non-africains. Fort de cela et réconforté par le fait d’avoir toujours vu juste, le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » appelle à la désescalade entre le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire.

Les Burkinabè sont les frères des Ivoiriens et les dirigeants burkinabè, quels qu’ils soient et de quelque manière qu’ils soient parvenus au pouvoir, restent des dirigeants amis. Le peuple de Côte d’Ivoire n’a aucun intérêt à entrer en guerre avec le Burkina Faso ou à déstabiliser ce pays. Par ailleurs, dès lors que des pays partagent une destinée commune en étant dans une zone monétaire, c’est-à-dire dans une intégration régionale, aucun pays membre ne doit être une source de déstabilisation d’un autre pays. Il faut plutôt promouvoir la paix entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso pour un intérêt partagé. Il y a des contradictions qui peuvent se résoudre sans tirer un seul coup de feu et sans chantage. Il faut renouer avec la confiance rompue et poser des actes forts qui ramèneront et consolideront cette confiance.

Ce qu’il faut faire pour instaurer un climat de confiance et de paix

L’histoire nous apprend que l’arrestation à Abidjan, le 27 juin 1967, du ministre des Affaires étrangères de la Guinée et du délégué de ce pays à l’ONU en représailles de la détention de plusieurs ressortissants ivoiriens à Conakry avait provoqué de vives tensions entre la Côte d’Ivoire et la Guinée qui venaient ainsi s’ajouter à la multiplication des incidents de frontière dans le courant de l’année 1966, après le renversement du président ghanéen Kwamé N’Krumah. « La décision du président Sékou Touré de relâcher ses prisonniers le 21 septembre suivie, quatre jours plus tard, d’une mesure analogue du président Houphouët-Boigny en faveur des détenus guinéens a mis un terme à une crise qui a duré près de deux ans » (Sources : René-Henri Rodolphe, Revue Défense Nationale, n°263 Décembre 1967).

Au vu de cette histoire des relations diplomatiques tumultueuses entre le Burkina-Faso et la Côte d’Ivoire, le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » :

– recommande aux autorités ivoiriennes et burkinabè de se retrouver pour engager sans délai des discussions franches dans le but de parvenir à un accord susceptible de ramener la paix. Un communiqué conjoint dans lequel chaque partie s’engagera à offrir à l’autre les garanties de sécurité attendues pour un bon voisinage devra sanctionner ces rencontres.

– appelle les autorités ivoiriennes à apporter une réponse claire et sans ambiguïté aux allégations de déstabilisation portées à leur encontre. Ne pas répondre à ces accusations d’une extrême gravité accrédite la thèse qu’elles sont fondées. Derrière la condescendance qu’il manifeste lorsqu’un Etat se croit en position supérieure, le silence après une accusation équivaut, en droit, à un aveu et donc à une acceptation de l’accusation et de l’assignation au rôle de coupable. Il faut éviter cette maladresse diplomatique que de mauvaises langues peuvent ériger en preuve de culpabilité.

Même si les opinions publiques sont tenues loin de la vérité des faits, en vertu de la confidentialité des renseignements, les canaux diplomatiques à travers des câbles quotidiens et les services de renseignement qui se partagent des informations (ce qu’on appelle la coopération de renseignement entre Etats ou partage collaboratif de renseignements) ont les éléments factuels exacts. Et, les échanges à huit clos sont l’occasion, pour chaque partie, de dire sa vérité à l’autre afin d’aboutir à un terrain d’entente et préserver la paix.

Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » attend aussi des Etats d’Afrique de l’ouest qu’ils accroissent, autant que nécessaire, leurs soutiens aux pays du Sahel dans leur lutte contre le terrorisme. L’Afrique ne pourra gagner cette guerre contre le terrorisme djihadiste que si elle reste unie et solidaire. C’est pourquoi le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » recommande à tous les Africains de ne pas prendre les contradictions secondaires pour la contradiction principale.

Nous, africains, notre contradiction principale devrait être la lutte contre le terrorisme dont la résolution stabilisera le cadre macro-économique et favorisera la prise de mesures pour booster l’économie ; ce qui ferait revenir au centre des préoccupations et au premier plan toutes les autres questions politiques, économiques et sociales. Ne tombons pas dans le piège et dans la logique de ceux qui ne rêvent que de voir l’Afrique se tromper de combat et de priorités.

Il faut comprendre et écouter le Burkina Faso en vertu du principe de bon voisinage en droit international  

Il faut comprendre la stratégie d’influence du Burkina Faso qui n’a pas besoin que la Côte d’Ivoire serve de base arrière aux terroristes ou aux réfugiés politiques burkinabè pour des opérations de déstabilisation. Il a déjà beaucoup à faire avec les terroristes dans les autres zones. Il ne veut donc qu’une seule chose : que la Côte d’Ivoire adopte une attitude amicale qui lui permette de se concentrer sur sa principale cible.

On a là une action digne des opérations psychologiques ou Opérations Militaires d’Influence (PsyOps/OMI) qui utilise la communication opérationnelle pour mobiliser les opinions publiques et la sienne en premier et agir sur l’environnement ou un leader stratégique (ici, les décideurs adverses) pour le pousser à se comporter d’une certaine manière ou à faire évoluer son comportement. On a une surenchère qui est faite pour obtenir des gains stratégiques évidents. C’est assez classique comme méthode. Les personnes non informées ou non outillées pour analyser les informations (il s’agit d’informations sensibles partagées à la communauté) considèrent cela comme une action juvénile peu digne d’intérêt.

Il faut comprendre le capitaine Ibrahim Traoré. Aller sur le terrain pour rencontrer la partie burkinabè comme l’a fait le ministre de la défense Téné Birahima Ouattara le 19 avril 2024 à Niangoloko est une belle initiative. Mais cela reste insuffisant. Il faut une rencontre d’experts dont la plénière sera sanctionnée par un communiqué conjoint auquel pourrait y être joint le politique.

Il faut tirer profit (en matière de renseignements) de l’intelligence partagée sur les sujets d’intérêt stratégique pour renforcer la confiance mutuelle. Cela permettra de fermer définitivement la page de cette crise de trop dans les rapports entre la Côte d’Ivoire et les pays de la sous-région. Seul le président de la République peut autoriser cette décrispation.

Si rien n’est fait, si la situation de tensions perdure, il faut craindre qu’elle soit exploitée par un acteur tiers qui a intérêt que la brouille entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso s’approfondisse pour aboutir à un conflit fratricide que les populations ne souhaitent pas.

Cet acteur peut s’habiller dans les tenues militaires de l’un des deux pays (opération sous faux drapeau) et provoquer un incident susceptible de déclencher un conflit armé. Dans la littérature militaire, ces pratiques sont courantes et font partie des multiples formes des opérations secrètes menées par des unités très aguerries. La situation est potentiellement dangereuse.

C’est pourquoi il faut vite revenir à un climat apaisé dans l’intérêt de la Côte d’Ivoire et du Burkina Faso. Il faudra aussi songer à matérialiser le tracé de la frontière commune, longue de 584 km et très poreuse. Les ministres Téné Birahima Ouattara et Vagondo Diomandé sont interpellés sur ce dossier. Mais le président de la République détient seul la clé pour ouvrir la chambre au trésor ou la boîte de Pandore.

 

Fait à Abidjan, le 16 juillet 2024.

Pour « Les Démocrates de Côte d’Ivoire ».

Le Président

Pr. Séraphin Prao

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